ABC de KF / MP - [Rennes - novembre 2007 (1)] - [Arzon - 17 août 2008]



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novembre 2007 [1]



C’est dedans. C’est dehors. C’est deux dans, oui, c’est deux hors. C’est deux temps. C’est. De temps en temps. Un. C’est. Deux temps. C’est. De temps en temps. Deux. Dehors. C’est. De temps en temps. Dehors. M’entre dedans. Par le temps. Parle tant qu’à la fin se forme un corps. Ici. Première action. Regard. Action de retour. Vers devant. Deux vents contraires. Deux vents contraires en présence sont là. Deux temps. Deux dans. Deux hors. Combien de corps. Ici. Premier état. Celui du jour. Où je viens. Celui du jour. Où je suis. Celui du lieu. Présent. Un état. Des lieux. Mon présent. Lettre à lettre. Inventaire. Inventer. Je. Te réinventerai l’alphabet. Je. Te dirai très vrai l’état présent du lieu où. Je. Un temps. De. L’interprète. Je. J’interprète. Une partition pour dire. Je. Pour dire qui je. C’est dedans. Qui je. C’est dehors. Qui je. C’est un temps. Pour dire je. Tu. Qui ça. Nous. Tremblement. Il me faut. Au présent du corps. Traduire l’état du lieu. Je vais balayer le temps. Lettre à lettre. Pour dire je. Tu. Nous. Comprends. Pour dire comment. Toujours j’ai voulu me marier. Tu comprends. Avec un homme. Dans l’espace. Un homme qui saurait dire. Si d’autres vivent. Dans l’espace. Dedans. Si d’autres vivent dedans. Et vont venir. Un homme. Qui interrogerait ça. Dans l’espace. Avec moi. Dedans. Je veux trouver une langue. Avec moi. Dedans. Un homme. Une langue. Une fiction. Je commence à comprendre. L’incompréhensible. Je commence à comprendre. L’écart entre. L’apparence que tu vois, et celle que je montre. Fiction : dans cette parole ou ce geste que j’invente : en lieu et place de cet incompréhensible. Je vais te raconter. Une blague. Il raconte sa blague. Personne ne comprend. Il sourit. Bonheur. Plaisir. De ne pas se comprendre. Il s’explique. Elle raconte. Je voudrais me marier. Avec une soucoupe volante. Non. Je voudrais me marier. Avec un cigare. Non. Je voudrais me marier. Avec un mot. Avec un corps. Je voudrais juste. Trouver un corps. Juste un accord. Entre un mot. Et un corps. Et là tu comprends. Tu peux pousser. Très loin. Le bouchon dans la fiction. Le bouchon, c’est la soucoupe volante. La fiction, c’est l’espace. Non. La fiction, c’est le chemin dans l’espace. Il y a : dans l’espace : un trou à boucher. C’est pour ça : le bouchon. L’espace est très grand n’est-ce pas. Et le bouchon tout petit. Et pour commencer, disons que nous sommes trois. Disons qu’il y a l’espace, le bouchon, et moi. Ensuite viennent les lettres, une à une. Et nous voilà quatre. Chaque lettre ne reste qu’un temps. Chaque lettre est une figure de toi. Vois celle-ci comme elle interroge le nom. Comme elle interroge la fiction. Comme elle pose la question. Du nom. De la fiction. Fiction du nom. F, comme fabuleux, comme fin. Déterminer (dé-terminer, dé-finir) : une série de mots avec lesquels chercher, mais dont aucun ne serait ni visible ni jamais dit. A chaque lettre est associé un mot dont le lien sera tout d’abord incompréhensible. Apparence d’une affirmation. Apparition d’un corps. Chaque lettre comme une pièce. L’agencement des pièces. La création d’une phrase. Edification d’une maison. Et sur ces ruines, je bâtirai mon empire. Le son des lettres. Le sens des sons. AC. OQP. BC, GBC, GABC, GOQP. A l’intérieur d’une même langue. A travers différentes langues. Là : on reconnaît des phrases. Là : on ne les reconnaît pas. Ce n’est ni du français, ni de l’allemand, ni du grec, regarde, c’est un corps, c’est une mémoire, c’est un souvenir. A la fin, oui, je peux lire. A la fin, je comprends la phrase : elle est inscrite, dans mon corps. Elle était inscrite et maintenant je sais la lire et je peux te la dire. Je peux la lire, l’entendre, la comprendre, je peux te la donner. Et. Chacun ici qui viendra : repartira avec une phrase. Chaque lettre est une pièce, une porte, une personne, un personnage, le nom d’une pièce, le nom d’un lieu, le nom d’un passage, le nom d’un personnage. Je n’invente rien : je me souviens. Chaque lettre est associée à un mot. Chaque lettre est associée à une idée. Chaque lettre est associée à un souvenir. Chaque lettre est associée à un corps. Chaque lettre est associée à une personne. Chaque lettre est associée à un personnage. Je reviens. Je ne suis jamais venu ici. Je reconnais. Je reconnais j’ignore quoi dans ces objets là que je trouve et que je n’ai jamais vus. Dans ces objets dont je me souviens. Qui me reviennent. Qui revient ? J’oublie. J’oublie tout. Si j’oublie, je ne reviens pas. Très bien. Si j’oublie : je viens. Sans revenir. J’oublie. J’oublie un mot. J’oublie. J’oublie une lettre. Je peux venir. Maintenant, je peux. Je découvre le mot. Je découvre la lettre. Je découvre la pièce. Je passe par la porte pour la première fois. Je découvre la personne. Je ne reconnais plus rien. Je m’ouvre à l’éternel présent. J’invente un souvenir, je convoque le souffle d’un enfant : il court vers sa mère, il a une enveloppe qu’il tient dans sa main droite au bout de son bras tendu, et il dit à sa mère en courant vers elle, tout joyeux, tout sourire : maman, maman, on vient de recevoir une lettre de l’être ! Eh bien, il était temps, pense la mère en elle-même. Une lettre. Perdue. Une. Lettre manquante. Ou bien. Une clé. ‘’J’ai perdu la clé’’. 1 : je fouille dans mon sac, je ne la trouve pas ; 2 : je suis face à la porte, je ne peux pas rentrer ; 3 : je n’arrive pas à lire le nom qu’il y a écrit sur la porte ; 4 : je me souviens : j’ai donné la clé à quelqu’un ; 5 : oui mais à qui. 6 : je m’assois, et je me souviens de celles et ceux à qui j’ai un jour donné ou prêté la clé, celles et ceux avec qui j’ai partagé la clé. ‘’J’ai perdu la clé’’.


[17 août 2008]